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COVID-19 : la solidarité est au cœur des actions

Publié le 27 mars 2020

Pendant l’épidémie, la solidarité est au cœur des actions des travailleurs sociaux, des locataires et des bénévoles d’Habitat et Humanisme Île-de-France. Découvrez en 3 témoignages.

 

« En cette période les loulous sont partout ! » 

Manga, Travailleur social, Essonne

Nihe Saba Manga

Je vis et j’interviens en tant que travailleur social sur le département de l’Essonne. J’ai plutôt l’habitude du télétravail parce qu’en temps normal, quand j’ai quelques fois rendez-vous avec des familles l’après-midi ici dans le 91, je télétravaille le matin de chez moi et je fais les visites à domicile l’après-midi.

Mais là, les choses sont quand même différentes parce qu’on a les enfants. Ma petite dernière a 5 ans, alors il faut télétravailler mais aussi être la maîtresse. Concilier le télétravail avec une vie familiale dans ce contexte, ça peut donner lieu à des situations cocasses ! L’autre jour, j’étais en pleine conversation téléphonique avec un partenaire sur un sujet important et je vois arriver ma fille dans tous ses états qui se lance dans une explication détaillée des dernières mésaventures de Mister Bean… A l’autre bout du fil, la dame s’est montrée compréhensive : « En cette période les loulous sont partout ! ».

Plus sérieusement, depuis le début du confinement, je suis sollicitée par certaines familles qui ne comprennent pas forcément ce qui se passe. Je pense par exemple à deux réfugiés qui vivent dans une colocation d’Habitat et Humanisme dans la Direction Territoriale Est, et qui ne savent ni lire ni écrire. Encore moins remplir une attestation ! Alors je leur ai rempli une attestation en ligne, je leur ai envoyée par SMS en ajoutant la photo d’un courrier disant que ces jeunes ne savent ni lire ni écrire et qu’ils ont besoin de se déplacer.

Je pense aussi à une dame qui vit seule avec sa fille et qui travaille habituellement par intérim et qui n’a plus de ressources. Elle a dû arrêter de travailler pour garder sa petite, de toute façon en ce moment, les agences ne proposent plus de missions. Je l’ai accompagnée pour les démarches d’ouverture de droit. Elle se fait beaucoup de souci sur la suite. 

Sur les 26 familles que j’accompagne, 10 continuent de travailler, malgré le confinement : souvent elles travaillent comme aide aux personnes âgées, en EHPAD ou au domicile des personnes. L’une d’elle me disait hier qu’elle continue d’aller travailler parce qu’elle a peur de perdre son travail si elle décide de s’arrêter. Elles ont beaucoup d’inquiétude quant à leur avenir. 

Télétravailler en conciliant vie familiale et vie professionnelle en cette période de confinement, c’est possible. Il faut trouver le juste milieu et s’imposer une rigueur sur les heures de travail qui doivent être les mêmes qu’en entreprise. 

 

« On s’est fait la Sibérie, la Polynésie française, un safari et de la broderie » 

Kevin, 31 ans, locataire de la colocation intergénérationnelle, rue de Chabrol à Paris. 

KevinComment on vit le confinement dans la coloc’ ? Très franchement, on le vit bien, ça nous a rapprochés. Normalement nous sommes six : une jeune étudiante, qui a rejoint sa maman le temps du confinement, et une mère célibataire avec 2 enfants qui s’est réfugiée au vert où les petits peuvent sortir. Du coup je me retrouve seul avec Dusica qui est la senior de la coloc’. 

Dusica a 70 ans, du coup elle ne sort pas mais je peux lui donner des coups de main : aujourd’hui, elle m’a fait sa petite liste et j’ai été lui faire les courses. Parfois elle est un petit peu inquiète, alors je lui donne des conseils : je lui dis de regarder un peu moins les infos à la télévision, je lui conseille des reportages, des trucs que l’on regarde ensemble et qui nous font un peu voyager. Récemment on s’est fait un safaris et quelques virées en Sibérie, sur les îles de la Polynésie française … on voyage pas mal…

On partage aussi des activités. Dusica, c’est une ancienne couturière, c’était son métier. Et il se trouve que la semaine d’avant, ma mère m’avait donné un nécessaire à couture, avec plein de trucs : fil, aiguille ; perles, sequins… Du coup on a ressorti tout ça et Dusica m’a appris à broder ! A la base, ce n’est pas trop mon truc la broderie… mais c’était sympa de faire ça ensemble. On a déjà fait des sacs, des t-shirts, plein de trucs ! 

On cuisine aussi beaucoup. Moi je me lance des petits défis : j’ai préparé des pizzas maison, du pain, du beurre de cacahuète aussi. Demain on va essayer de préparer la petite pâte japonaise aux haricots rouges. On se lance dans des choses qui font un peu peur au début, et puis finalement dès qu’on se lance on s’aperçoit qu’on est capables de le faire. 

Et surtout, tous les soirs à 20h, on a une pensée pour les personnes qui souffrent : d’être malade, d’avoir perdu quelqu’un ou d’être en réanimation. Au final, on essaie de garder le moral et on se dit qu’on est bien loti. 

 

« Déjà de beaux gestes à partager »

Raymond, co-responsable de l’Antenne des Hauts-de-Bièvre et de l’accompagnement bénévole

Raymond Gourlot C

Un peu plus d’une semaine de confinement et déjà de beaux gestes à partager, comme celui de ce jeune locataire réfugié en logement temporaire qui, dès les premiers jours, m’appelle et me dit : « Écoutez, moi ça va, je suis en forme et je suis en télétravail. S’il y a d’autres locataires qui ne peuvent pas sortir de chez eux pour faire leurs courses, appelez-moi, je le ferai ». Puis, nous avons échangé sur le confinement et il m’a fait part de son vécu : « Avant d’arriver en France, pendant plusieurs mois, j’ai été sous les bombes dans mon pays. Entre le confinement d’ici et de là-bas… ce n’est pas la même chose, ce n’est pas le même stress ! Là-bas, quand tu entends les obus qui passent de tous les côtés, qui te tombent dessus… Là tu as peur ! Non, vraiment, ici le confinement ce n’est pas le même stress. Je ne me sens pas malheureux. ».

Ou ce tout nouveau et jeune bénévole qui se propose également spontanément pour dépanner les familles qui ne pourraient pas sortir. Nous n’avons pas encore eu besoin de les solliciter.

Ou encore, dans un immeuble, une maman locataire qui nous sert bien volontiers de relais pour garder le contact avec un locataire seul plus âgé qui n’a plus de téléphone.

Le télé-accompagnement, c’est aussi beaucoup de besoin d’écoute, d’explications sur les règles de sortie. Et une attestation de déplacement dérogatoire qui ne peut pas être imprimée, ou pour certains locataires, rédigée manuellement même avec une assistance téléphonique.  

Et en peu de temps, il a fallu mettre en place, au niveau de l’antenne, une cellule de pilotage (Responsables + Travailleur social), avec un outil synthétique de suivi partagé et des conférences audio régulières pour s’assurer de la situation de chaque famille. Et malheureusement faire face très vite aux premières contaminations de nos locataires.

Grâce à nos binômes travailleur social et bénévole accompagnant, qui s’adaptent au nouveau contexte, la présence complémentaire à distance auprès de nos familles est assurée.

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