INVESTISSEZ SOLIDAIRE pour le logement des personnes âgées
« Noël doit nous inviter à dire non à ces morts sociales qui plongent tant de nos concitoyens dans des abîmes dont ils ne peuvent pas se relever seuls.
La fraternité, chaque fois que nous la retissons, s’avère une source de relations où la raison a sa place, sans pour autant déloger celle du cœur. »
Découvrez l’édito de Bernard Devert.
Publié le 18 décembre 2025
« Hallelujah », « hallelujah » !
Avec ces premiers mots, peut-être allez-vous demander si je n’aurais pas un peu perdu la tête ; puis-je espérer que non. Ces alléluias du Messie de Haendel, il me fut donné la joie de les réentendre lors du Gospel Philarmonic Expérience, clôturant l’année du 40ème anniversaire de notre Mouvement.
Etonnement et émerveillement de voir toute une assemblée de plus de 1 500 personnes, joignant leur voix aux choristes, à l’invitation de son chef de chœur, Pascal Horecka.
Le chœur et les cœurs à l’unisson, l’assemblée témoigna d’une fraternité vibrante, saisissant que chacun était là réuni, non pour se rappeler ce qui avait été entrepris mais pour, ici et maintenant, agir avec plus d’audace contre l’absence ou l’indignité du logement ; un malheur qui nous résiste et même s’aggrave sans que la Société cherche vraiment à l’enrayer.
S’habituer au tragique, est pathétique.
Heureusement, combien ont exprimé au sortir de ce concert, leur volonté de faire davantage, portés par ce gospel dont le mot signifie bonne nouvelle.
Là, où se fait jour une bonne nouvelle, c’est toujours un moment où, en soi, s’éveille une ouverture faisant naître un espoir, plus encore une espérance.
N’est-ce pas cela la fête de Noël, une naissance ; bien plus qu’un souvenir, une mémoire qui fait advenir.
Tous, croyants ou pas, animés par une même foi en l’Homme, étaient habités par un même désir : faire surgir de nouveaux possibles. Comment ? Alain, le philosophe, nous dit avec humour et réalisme, qu’il en a trouvé le secret : « il s’agit de s’y mettre ».
S’y mettre, c’est refuser de se démettre. Sans doute, faut-il oser prendre plus de risques, ce qui peut apparaître, ici et là, folie. La sagesse, décrochée de toute aspiration vers un l’idéal, n’est-elle pas ennuyeuse, jusqu’à se révéler soeur d’un pessimisme destructeur qui ronge.
La cause que défend Habitat et Humanisme se présente comme un acte de résistance afin que les plus vulnérables trouvent leur place parmi nous. Telle est notre mission ; ne la désertons pas.
Entendons cette parole, incroyablement actuelle : et les autres, rappelait cette voix aux bâtisseurs de Babel qui cependant construisent toujours des lieux qui classent, séparent, mettant à mal les liens de fraternité.
Cette voix, quand elle nous touche, donne naissance à ces possibles permettant d’habiter une harmonie où l’autre, les autres trouvent enfin leur place.
Quelles que soient notre histoire, nos attentes, nos recherches, la présence de l’enfant est toujours un appel à naître à un ‘autrement’. Ne nous étonnons pas que Celui né à Bethléem nous ait rappelé que le Royaume des cieux, entendons le royaume du cœur, ne pouvait être approché que si nous prenions le risque d’habiter cette terre avec un cœur d’enfant.
Claudel, au soir de Noël 1886, aura ces mots d’une fulgurante reconnaissance : « j’eus tout à coup le sentiment déchirant de l’innocence et de l’éternelle enfance de Dieu ».
Qui devant un enfant ne désarme pas ! Qui devant la rencontre avec l’Enfant-Dieu ne désarme pas absolument, pour être délivré de ces inessentiels qui font le lit des idéologies.
Ce qui me tourmente, dit Saint-Exupéry dans « Terre des hommes », c’est Mozart qu’on assassine dans tous ces crimes contre l’homme.
Noël doit nous inviter à dire non à ces morts sociales qui plongent tant de nos concitoyens dans des abîmes dont ils ne peuvent pas se relever seuls.
La fraternité, chaque fois que nous la retissons, s’avère une source de relations où la raison a sa place, sans pour autant déloger celle du cœur.
Commence alors une recherche patiente de ce qui unit plutôt que ce qui désunit. Tout n’est pas réglé ; cependant tombent des crispations pour qu’il n’y ait pas d’un côté, eux, et de l’autre, nous.
A ne plus supporter les autres au motif qu’ils sont différents, notre Société se déchire ; les lignes en sont déjà bien visibles au sein des territoires. Souvenons-nous des mots de Gérard Collomb quittant le Ministère de l’Intérieur : « Aujourd’hui on vit côte à côte… Je crains que demain on ne vive face à face ».
Il y a ici un risque anthropologique ; il donne le vertige.
A ne pas en voir le danger et l’écarter, notre terre deviendra inhabitable. Et si Noël, devant un enfant désarmé et désarmant – comme tous les enfants – nous invitait à nous interroger sur le monde que nous construisons.
Là commence l’aventure de la fraternité. C’est aussi cela Noël.
Bernard Devert
Décembre 2025